Les problèmes de voisinage dégénèrent parfois en véritable harcèlement. Quels sont les recours contre un voisin agressif ? Comment apporter la preuve du harcèlement subi ? Eléments de réponse.
Table des matières
Voisin menaçant : quels recours ?
Face à un voisin qui se révèle agressif verbalement et profère des menaces, il faut agir rapidement. A ce stade, la démarche amiable n’est généralement plus une option. Il est alors possible de recourir à un tiers. Si le voisin est locataire, vous pourrez contacter le propriétaire du logement pour l’informer et lui demander de faire en sorte que vous puissiez retrouver votre tranquillité. Si vous êtes au sein d’une copropriété, adressez-vous au syndic. Vous pouvez également demander au maire de votre commune d’intervenir. Un médiateur ou un conciliateur de justice peut aussi être sollicité afin de régler le conflit. Lorsque toutes ces possibilités sont épuisées et que le voisin continue à se montrer menaçant, vous n’aurez plus d’autre choix que d’appeler la police et de déposer une plainte contre lui.
Quand parler de harcèlement moral entre voisins ?
Le harcèlement sexuel ou moral est souvent évoqué sur le lieu de travail, mais plus rarement entre voisins. Ce type de situation peut également survenir et se traduire par des conséquences sur la santé morale et/ou physique pour le voisin harcelé. Selon la loi, la répétition de propos et de comportements ayant pour but ou effet une dégradation des conditions de vie de la victime constitue un harcèlement. Il peut s’agir de menaces, d’insultes, de propos obscènes, d’appels, courriels ou SMS malveillants, de dégradations, de provocations. Et le juge peut considérer que le harcèlement est effectif, peu importe les relations entre les protagonistes. Le harcèlement moral entre voisins peut donc être pointé par un tribunal.
Comment prouver le harcèlement d’un voisin ?
Comme nous venons de le voir, le harcèlement sera réprimé par la justice, quelle que soit la situation. Il est revanche parfois difficile d’appuyer sa demande par des preuves. C’est pourquoi toute preuve que la victime a pu recueillir est admissible en justice. Dans le cas d’un conflit entre voisins menant à des éclats de voix, des insultes et menaces, il est fort probable que d’autres voisins aient pu entendre la teneur des propos exprimés. Il est donc conseillé de rassembler tous les témoignages des voisins. Vous pourrez parfois vous heurter à la mauvaise foi des voisins qui craignent des représailles. Vous pourrez fournir tous les courriers que vous avez envoyés au harceleur et à des tiers dans l’espoir de faire cesser ces agressions. Evidemment, toute menace écrite doit être présentée. Si des dégradations ont été commises, vous pourrez en proposer des photos et, mieux, un constat d’huissier.
Main courante contre un voisin
Afin de renforcer votre dossier, vous pourrez chaque fois que la situation vous paraît le justifier, déposer une main courante à la gendarmerie ou à la police. Aucune enquête n’est déclenchée, mais cette démarche permet de garder une trace des faits en vue d’une potentielle procédure à venir. Vous pourrez y dénoncer des menaces, des tapages nocturnes ou des dégradations par exemple.
Comment puis-je agir contre les actes de harcèlement répétés de mon voisin ?
Contacter votre voisin
Visites nocturnes, courriers à répétition, dégradations, nuisances volontaires (bruits, odeurs…)… les agissements d’un voisin peuvent parfois être subis comme un véritable harcèlement contre lequel vous avez la possibilité d’agir. La première solution, de bon sens, consiste à entamer le dialogue avec lui, oralement et/ou par courrier, afin que ces troubles cessent. Exemple : en cas de bruits la nuit, vous pouvez adresser une lettre de plainte pour tapage nocturne à votre voisin (voir notre modèle de lettre).
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Signalement
Mais parfois, ces démarches amiables ne suffisent pas et d’autres solutions doivent être envisagées. En premier recours, vous pouvez tenter de faire intervenir un tiers afin que celui-ci tente de faire cesser le trouble. Ce tiers peut être le propriétaire (si votre voisin est locataire), le syndic (si vous vivez en copropriété) ou le maire de votre commune (à qui il convient alors d’adresser une demande d’intervention du maire par courrier). Vous avez également la possibilité de recourir à un médiateur ou à un conciliateur de justice afin que celui-ci tente de trouver une solution amiable au conflit de voisinage.
Porter plainte
En cas d’échec, vous pouvez choisir d’appeler la police ou la gendarmerie et/ou de porter plainte lorsque les agissements que vous subissez sont constitutifs d’une infraction pénale. C’est notamment le cas :
- du tapage injurieux ou nocturne ;
- des menaces ;
- des insultes ;
- des violences ;
- des dégradations de biens ;
- etc.
Action en justice
Enfin, en cas de dommage physique ou moral (dépression, accident, maladie, etc.) subi du fait de ce harcèlement, vous pouvez envisager une action en justice contre votre voisin en saisissant le tribunal civil afin de demander réparation de votre préjudice sur le fondement de l’article 1240 du Code civil.
Les troubles de voisinage recouvrent des situations extrêmement variées de conflits dus à l’activité ou au comportement d’une personne physique ou morale qui, par elle-même ou par l’intermédiaire de personnes, animaux ou choses dont elle est responsable occasionne un préjudice à son voisin.
Seul le trouble anormal, à savoir celui qui excède ce qu’une personne est censée tolérer dans le cadre d’une relation de voisinage est réparable.
Le bruit subi du fait de ses voisins peut être sanctionné de différentes manières :
- Le code de la santé publique, en son article R.1337-6, s’est attaché à le condamner, prévoyant même, à titre de sanction, une peine d’amende pouvant aller jusqu’à 450 euros maximum pour l’auteur de l’infraction et, éventuellement, la confiscation de l’objet ayant servi à commettre l’infraction.
S’agissant d’une infraction pénale, il convient alors de la faire constater par un agent de police judiciaire ou de porter plainte auprès du commissariat de police ou de la brigade de gendarmerie le plus proche. Le procureur de la République, après transmission du procès-verbal, décidera de poursuivre ou non, selon les circonstances des faits (selon l’application du principe de l’opportunité des poursuites).
Le bruit excessif peut être condamné, même sans mesure sonométrique, s’il est jugé “ inutile, désinvolte ou agressif ” (circulaire du 27 février 1996). Chaque situation doit faire l’objet d’une appréciation au cas par cas.
- Le maire, eu égard à ses pouvoirs de police, peut également intervenir. En effet, il est tenu, conformément à l’article L.2212-2 du code des collectivités territoriales, de “ réprimer les atteintes à la tranquillité publique, … les bruits, y compris les bruits de voisinage, … tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique ”. Il pourra, sur ce fondement, faire constater le trouble, contrevenant à un arrêté municipal préalablement pris, par tout agent municipal. Le même agent pourra alors tenter une médiation avec le voisin récalcitrant. S’il n’obtient pas satisfaction, celui-ci pourra transmettre un procès-verbal d’infraction au procureur de la République.
S’il décide de poursuivre, le tribunal prononcera, à l’encontre du contrevenant, une peine d’amende et le condamnera à des dommages et intérêts si le plaignant s’est constitué partie civile.
- Enfin, le tribunal d’instance peut également être saisi à l’initiative de l’administré subissant le trouble, sur la base des troubles anormaux de voisinage et de la responsabilité civile de chacun (article 1382 du code civil). L’assistance d’un avocat n’est pas obligatoire devant cette juridiction.
L’action doit être dirigée contre l’auteur du trouble. Pour ce faire, il convient de notifier à ce dernier une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé réception. A défaut de règlement amiable, toute victime de nuisance est susceptible de saisir les tribunaux civils pour trouble anormal de voisinage Cette démarche permet, si l’anormalité du bruit est reconnue, d’obtenir leur cessation et des dommages et intérêts.
Pour plus de précision, la jurisprudence ne condamne que le “trouble anormal de voisinage”, c’est-à-dire celui qui est manifestement excessif. Il n’existe pas de définition du trouble anormal.
Les tribunaux parlent habituellement à ce sujet des « limites aux inconvénients normaux du voisinage ». C’est le franchissement de ce seuil qui constitue le trouble anormal de voisinage et permet d’accorder à la victime la réparation du trouble invoqué (Cour de cassation, 3e chambre civile, 5 octobre 1994). Le critère est donc l’anormalité, le caractère excessif du trouble. En dessous de ce seuil, il s’agit d’un inconvénient normal de voisinage que tout un chacun doit supporter.
C’est la personne qui invoque le trouble qui doit prouver la réalité et l’étendue du préjudice subi (Cour d’appel de Paris, 6 mars 1992).
Le tribunal apprécie souverainement, au cas par cas, l’existence, l’étendue et l’importance du trouble de voisinage (Cour de cassation, 3e chambre civile, 9 juin 1993). De ce fait, la notion de trouble excessif de voisinage est très subjective et varie en fonction des circonstances de fait.
En outre, la responsabilité du bailleur peut être recherchée si la personne causant un trouble de jouissance est également locataire du même propriétaire.
En effet, au titre de l’article 1725 du code civil, le bailleur n’est pas tenu de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voies de fait à sa jouissance. Cependant un colocataire ou un locataire ayant le même bailleur n’est pas considéré comme un tiers .
La responsabilité doit se limiter aux seuls actes du locataire provenant des droits qu’il tient de son bail et de la jouissance de ce dernier (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 24 octobre 1969).
Le locataire troublé doit agir contre le bailleur commun et non contre le locataire, quitte pour ce bailleur à mettre en cause l’auteur du trouble et l’appeler en garantie. C’est seulement en cas d’abus manifeste de jouissance d’un locataire que le preneur pourra agir directement contre le locataire responsable, notamment en cas de bruit exagéré et intempestif ou dans le cas d’injures (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 8 février 1972).
Le locataire troublé peut demander la condamnation du bailleur sous astreinte (c’est-à-dire qu’il doit verser une somme d’argent par jour de retard) à faire cesser le trouble. Il peut demander soit l’exécution des travaux nécessaires à la cessation du trouble, soit la réduction du montant des loyers ou la résiliation du bail en cas de troubles graves. Il peut également obtenir des dommages et intérêts lorsque le trouble provient d’une faute du bailleur.
Le preneur doit être indemnisé de son préjudice par le propriétaire. Il peut y avoir partage de responsabilité entre le bailleur et le locataire (Cour de cassation, chambre civile, 18 juillet 1964).
Le locataire, victime d’un trouble de jouissance qui relève de la responsabilité de son bailleur, peut saisir le tribunal d’instance.
Enfin, l’article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précise que le bailleur est tenu :
– de délivrer au locataire le logement en bon état d’usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location ;
– d’assurer au locataire la jouissance paisible du logement ;
– d’entretenir les locaux en état de servir à l’usage prévu par le contrat et d’y faire toutes réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l’entretien normal des locaux loués.
Aussi, lorsqu’un trouble restant à la charge du propriétaire apparaît, le locataire doit-il, dans un premier temps, mettre en demeure le bailleur, par lettre recommandée avec accusé de réception, de réaliser les travaux nécessaires. La jurisprudence est constante sur ce point et refuse tout remboursement au locataire qui n’a pas respecté cette exigence et qui a, par lui-même, réalisé les travaux (arrêt de la cour de cassation du 7 février 1990).
A défaut d’accord du bailleur, le locataire a la faculté de saisir la commission départementale de conciliation située dans les locaux de la préfecture du département afin de parvenir à un arrangement à l’amiable.
En cas de refus persistant du bailleur, le preneur peut engager un recours devant le tribunal d’instance visant à obtenir sa condamnation à la réalisation des travaux (article 1184 du Code civil) ou à se faire autoriser par le juge à effectuer lui-même les travaux aux frais du bailleur (chambre civile de la Cour de Cassation 19 juillet 1950). A cette occasion, le juge peut autoriser le locataire à consigner les loyers le temps que les travaux soient réalisés. L’assistance d’un avocat n’est pas obligatoire devant cette juridiction.